C'était l'heure où les senteurs de la nuit commencent à dire aux humains que la vie est mince comme un cheveu.
Sony LABOU TANSI, Le commencement des douleurs, Seuil, 1995
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C'était l'heure où les senteurs de la nuit commencent à dire aux humains que la vie est mince comme un cheveu.
Sony LABOU TANSI, Le commencement des douleurs, Seuil, 1995
Je pèse comme un enfant, peu visible mon empreinte, et quand je marche, plus suspendu que sujet à l'attraction terrestre, une feuille à sa branche, généalogique mais d'attache fragile, un enfant porté par le fleuve vers une terre à la promesse toujours retardée, et plus inquiet de ce flottement que de la force qui courbe mes épaules vers le sol.
Je pèse si peu.
Comment lui dire que de sourds ressorts se détendent dès que les trains recommencent à rouler ; comment lui expliquer que la paix rend l'homme fou, que les femmes se mettent brusquement à fumer, les idiots à faire de la politique, les rêveurs à s'ébranler ?
Je luis dis :
"J'ai voulu connaître d'autres cieux, me rapprocher du foyer où se font les échanges humains ; j'en ai longtemps été empêché par la guerre. Sitôt que j'ai vu l'ouverture, j'ai filé.
Antoine BLONDIN, L'humeur vagabonde, La table ronde, 1955
deux cerises
un cordon
même chair
même sang
Nous avions commencé à trinquer, nous qui, depuis toujours, avions regardé le soleil se lever et se coucher tous les jours aux mêmes endroits.
Sony LABOU TANSI, Le commencement des douleurs, Seuil, 1995
Les mollets lourds
de la poussière des sentiers
on rêverait de l'accord des bois
parfait de désordre
inspiré
goûterait de confiance
le mystère d'un gamelan à venir
dans le juste hasard d'une ondée
grand-œuvre vertical
consolant de son lait végétal
libéré des écorces
La bouche sèche
de la poussière des sentiers
j'envierais ce parler clair
ensemble percuté et fluté
par la grâce de bras anonymes
et de poitrines sans nombre
confondues
Non, je n'irai pas à la ligne. Le texte doit continuer d'un seul tenant, bloc d'opacités dissimulant toutes les extensions, les contractions, les dilatations des temps, des paroles, des lieux, des silences. Non, je n'irai pas à la ligne pour indiquer le suspens, la pause, le hoquet, le saut. J'exige un fondu-enchaîné interrompu entre le là-bas d'autrefois et le ici de maintenant.
Dominique ROLIN, L'infini chez soi, Denoël, 1980.
Jour sans pain par son allongement et parfois d'hostie attendu comme le messie d'un soleil éternel qui pourtant chutera dans l'heure liquide d'un crépuscule monochrome, c'était dimanche. Il aurait fallu en maître du temps y dresser un zénith perpétuel, effaçant les mirages des routes rectilignes et tous leurs points de fuite, y souffler les vieilles lunes pour se dégager une voie toute de lait.