Roman : Jusqu'à la page cinq je ne sais pas encore de quoi il est question. À la page dix je suis confirmé dans le fait que je faisais semblant. La suite n'est donc pas nécessaire.
Jean-Paul ROGUES, S'écarter du sujet, Le Dé Bleu, 1988.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Roman : Jusqu'à la page cinq je ne sais pas encore de quoi il est question. À la page dix je suis confirmé dans le fait que je faisais semblant. La suite n'est donc pas nécessaire.
Jean-Paul ROGUES, S'écarter du sujet, Le Dé Bleu, 1988.
Ainsi va le domestique ! Je ne serai jamais libre de servir de truchement aux esprits qui passent si volatils, s'il faut toujours que je serpille. Fallait-il même que je serpillasse tout ce temps comme un poisson terrifié de vivre au fond de l'eau qui attendrait que des pattes et des poumons lui poussent.
Jean Paul ROGUES, S'écarter du sujet, Le Dé Bleu, 1988.
À CEUX QUI
SUR UNE RIVE
OUVRENT LA BOUCHE PAR GRAND VENT
ET CRIENT
DES PAROLES D'AMOUR,
avalées aussitôt par le souffle,
tandis que de l'autre côté du fleuve
se lisent d'immenses publicités sur les buildings.
Marie-Claire BANCQUART, Terre Énergumène, Le Castor Astral, 2009.
À chacun sa rive, à chacun sa dérive...
C'est la mode des listes en littérature.
Dans la plus pure tradition oulipienne, Georges PEREC s'est montré un excellent plagiaire par anticipation dans ce genre, avec sa radiophonique tentative de description de choses vues au carrefour Mabillon le 19 mai 1978.
Exemple :
un homme avec une grosse sacoche...
un type avec une casquette Adidas...
une Méhari orange...
passe un autobus 87 : publicité pour Véronique Sanson...
une demi-douzaine de parapluies qui traversent le boulevard...
une 2CV vert pomme...
un cycliste qui fait signe au taxi de se magner...
un oiseau qui passe dans le ciel...
personne à la terrasse du café Mabillon...
une petite fille qui me tire la langue...
on entend une sirène de police...
un camion qui transporte je ne sais quoi, des trucs compliqués...
il a l'air de moins pleuvoir...
une vieille Volkswagen avec des auto-collants sur la portière...
un connard avec une voiture rallye...
un couple, tous les deux en salopette...
un camion qui livre des pommes de terre et des oignons...
4 officiers de quelque chose, peut-être de l'Armée du Salut...
un curé avec une grande barbe...
un homme avec une veste de travail...
un homme avec les mains dans les poches...
apparemment, il ne pleut plus...
une camionnette des PTT : « un coup de fil ça fait toujours plaisir »...
(L'inventaire de la semaine passé n'a peut-être pas permis de tout remettre en ordre.
Quoi qu'il en soit, Sur du Vent annonce fièrement que cette note était la 500ème !)
Les commerces de bouche ont baissé leur acier
Voici la nuit sans vitrine
Attelés sous la froidure
tous les dos épousent la lune
Deux hyènes sont affrontées
de couleur feu
mais sans la disgrâce qui s'attache à leur nuque
Que leurs peaux soient livrées
aux cornemuses qui consument l'insomnie
Vermoulu le pont-levis s'est désagrégé
En contrebas d'un blason de gueules
le fossé restera fossé
abandonné des effraies même
lupanar, n.m. : maison, généralement close, où par tolérance on peut avec les louves prendre son pied.
...[le ramoneur] m'avoua qu'il passait ses nuits à lire des lettres d'amour calcinées, les plus bouleversantes, les plus terrifiantes, les plus étonnantes, celles que le destinataire ne reçoit jamais, jamais ; celles qu'aucune créature n'ose jeter à la boîte, des lettres qui dépassent l'entendement, d'une sexualité épique, des lettres brûlées par les mots eux-mêmes, et que toute autre littérature lui paraissait inexistante à ses yeux, mensongère, exsangue, interchangeable, tout juste bonne à de pauvres petites culottes courtes de ton espèce...
René de OBALDIA, Le Centenaire, Grasset, 1960.
La nouvelle compilation de haïkus d'Hélène LECLERC et André DUHAIME a pour thème le sport et s'intitule Adrénaline (Éd. Vents d'Ouest, 2009).
Bien qu'elle manque un peu de souffle pour mon goût, extrayons tout de même ce texte d'Abigail FRIEDMAN :
l'eau de la piscine
s'écoule de mon oreille
le bruit du monde