greniers
de ce siècle
sans conscience des hivers
appétit pour l’instant
chapelet d’oublis
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greniers
de ce siècle
sans conscience des hivers
appétit pour l’instant
chapelet d’oublis
revenant
d’un ciel de Chagall
acrobatie molle
de la sieste
achevée
La raison est une béquille qui se prend pour une jambe.
Louis SCUTENAIRE, in Ici on parle flamand et français, Le castor astral, 2005.
des viscères de saints
au kilomètre
infini de la foi
les Lumières
à des années-lumière
Avec les mots on marque le mouvement. Avec les images on le fixe.
Louis SCUTENAIRE, in Ici on parle flamand et français, Le castor astral, 2005.
Carrés dans les sables
Dans ces déserts chaque page écrite, comme frappée au coin, devient vibrante et inspirée... mouvante d'objets, d'animaux, de tout ce qu'il y a au monde... au monde de cet Orient
mouvante d'eaux, d'yeux, de portes
mouvante de têtes qui se dressent
qui soufflent, qui se battent, qui parlent
mouvante de barrières
mouvante de mains droites et gauches
mouvante de mains qui s'arment, se serrent et travaillent
de paumes qui se font signe
de mains derrière leur bouclier, en prière
mouvante de louanges
mouvante de linteaux
mouvante du peu d'eau où boivent des chameaux
mouvante de l'eau traversée par les bœufs
mouvante de fondations
mouvante de cuillères
et d'aiguillons
et mouvante de châtiments
et mouvante de singes exhibant leur verge
et mouvante de palais
de broderies
mouvante aussi de chants fervents
et mouvante de tribus
et mouvante de bouches appelant le lait
et mouvante de gorges se formant sous les pieds
et de pénis
et mouvante de profils
et mouvante d'eau retenue
et mouvante de barques prudentes
et mouvante de dents à venir, à se multiplier
et mouvante d'armes tirées des sables
et mouvante d'étendues sans clôtures
et mouvante de mirages comme des vanités
et mouvante de faux prophètes
mouvante d'ennemis débouchant sur les villes
et mouvante de tout ce qui viendra sur l'éternité
dans la maison ou sous d'autres souffles
dit à dessein par l'inventeur des signes pour être sous le même bouclier
récits à méditer
récits de toute sorte
récits à discuter en tous sens
pour les offrir à l'esprit
pour les recevoir comme manne
rouleaux à dérouler en idées
ou pour se résoudre en poésie.
Idéogrammes en Chine
À cette lumière toute page écrite, toute surface couverte de caractères, devient grouillante et regorgeante... pleine de choses, de vies, de tout ce qu'il y a au monde... au monde de la Chine
pleine de lunes, pleine de cœurs, pleine de portes
pleine d'hommes qui s'inclinent
qui se retirent, qui s'en veulent, qui font la paix
pleine d'obstacles
pleines de mains droites, de mains gauches
de mains qui s'étreignent, qui se répondent, qui se lient à jamais
pleine de mains face à face,
de mains sur leurs gardes, de mains occupées
pleine de matins
pleine de portes
pleine d'eau tombant goutte à goutte des nuages
pleine de bacs qui traversent d'une rive à l'autre
pleine de levées de terre
pleine de creusets
et d'arcs et de fugitifs
et pleines de calamités
et pleine de voleurs emportant sous le bras les objets volés
et pleine de convoitises
et pleine de mailles
pleine aussi de paroles sincères
et pleine de réunions
et pleine d'enfants nés coiffés
et pleine de trous dans la terre
et de nombrils dans le corps
et pleine de crânes
et pleine de fosses
et pleine d'oiseaux de passage,
et pleine de nouveaux-nés - que de nouveaux-nés ! -
et pleine de métaux dans les profondeurs du sol
et pleine de terres vierges
et de vapeurs qui montent des herbages et des marais
et pleine de dragons
pleine de démons errant dans la campagne
et pleine de tout ce qui existe dans l'univers
tel quel ou autrement assemblé
choisi à dessein par l'inventeur de signes pour être ensemble
scènes pour faire réfléchir
scènes de toute sorte
scènes pour offrir un sens, pour en offrir plusieurs,
pour les proposer à l'esprit
pour les laisser émaner
groupes pour résulter en idées
ou pour se résoudre en poésie.
Henri MICHAUX, in Ici on parle flamand et français, Le castor astral, 2005.
même lune
à l’autre bout de la rue
ma maison derrière moi
face cachée