Avec les mots on marque le mouvement. Avec les images on le fixe.
Louis SCUTENAIRE, in Ici on parle flamand et français, Le castor astral, 2005.
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Avec les mots on marque le mouvement. Avec les images on le fixe.
Louis SCUTENAIRE, in Ici on parle flamand et français, Le castor astral, 2005.
L'évidence
Elle ne s'entoure pas de mots,
de ces mots qui engagent parfois le poète,
dans un marais de poissons flétris.
L'évidence,
on la trouve parfois à l'hôpital
sur une feuille de températures
sans syllabes,
pleine de chiffres qui ne riment pas,
muette et blanche
au seuil de cette mort
qui inspire tant de mots aux poètes,
mais ne parle pas.
Jeanine MOULIN, Les mains nues, Librairie St Germain des Prés, 1971.
aiguillage des mots
vers des lieux communs
riposte par la syntaxe
étrange
du poète
nuit
jour
les mots sont sacrés
le vitrail entre les deux
Il faut réinventer le monde
Avec des mots couleur de blé
Aussi lisses que des galets
Sur le cuir d'une fronde.
Il faut larguer vers la lumière
Des mains ayant forme d'oiseaux
Et pénétrer parmi les eaux
Sous l'abri des paupières.
On touche alors à l'apparence
Que les yeux ne savent pas voir,
A la vérité des miroirs
Devenus transparences.
Roger FOULON, L'envers du décor, Ed. du Spantole, 1967.
2017 ne suffira peut-être pas à ce programme,
mais on peut se souhaiter
d'au moins essayer !
Promenade
Nous gravissons les sentiers
de la montagne en parlant
et tout ce que nous disons
- bon ou mauvais
s’enfonce dans la montagne
et ne bouge plus
Une nappe de pluie
sur l’herbe où les moutons paissent
sur les pentes
toisons mouillées
et leur bêlement s’enfonce
dans la montagne
comme les mots
Gyrdir ELIASSON, Trad. Catherine Eyjolfison et l'auteur, Action Poétique n° 174 décembre 2003.
Élève tes mots, pas ta voix.
C'est la pluie qui fait grandir les fleurs, pas le tonnerre.
Djalâl-od-Din Rûmî, Mathnawî - la Quête de l’Absolu, Trad. Eva de Vitray-Meyerovitch, Le Rocher, 2014.
Des mots pour nous
Même avec nos jours tachés d’un peu de soleil
nos gestes ressemblent encore
à ceux des réfugiés.
Les yeux affamés
la bouche desséchée
ça nous va toujours bien.
Au loin
dans le ciel
toutes ces illusions d’arsenaux s’écroulent
mais celles de la ville future
s’écroulent aussi
et il apparaît une silhouette
sur du papier brûlé.
Nous ne sommes pas encore habitués
à saluer des morts
nous ne savons pas encore apprécier
la terreur
nous ne savons pas mesurer
combien d’espace nos mots soutiennent.
Notre mémoire se lie à des objets brisés
et nos mots ne recueillent que brisure et débris.
TO Kazuko, Action poétique n° 25, octobre 1964.