Un abandon en suspens.
Nul n'est visible sur terre.
Seule la musique du sang
assure résidence
dans un lieu si ouvert.
Alejandra PIZARNIK, Œuvre poétique, Actes Sud, trad. Claude Couffon, 2005
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Un abandon en suspens.
Nul n'est visible sur terre.
Seule la musique du sang
assure résidence
dans un lieu si ouvert.
Alejandra PIZARNIK, Œuvre poétique, Actes Sud, trad. Claude Couffon, 2005
contre-jour
silence
silhouette
que l'oiseau
et les ailes
et la tête
Les lignes du papier ni le tracé des lettres ne pourront contenir la langue, qui glisse sur le papier
librement comme les sons dans l'air sans relief ou les images dans la soie des esprits en partance
Un mot peut être exact, la langue jamais, qui charrie tout le limon nécessaire à en brouiller le génie
sous l'apparence de musique réglée où se rangent les lettres, le plomb laissant aux pieds toute liberté
La grammaire donne la justesse à la langue, qui l'étend en tous sens, jusqu'aux danses et aux transes de la folie
et les sons se départissent des barreaux de la portée, s'affranchissent de leurs racines et volent en symboles
débarrassée du squelette de ses lettres, à tire d'aile la langue s'éploie toute de nerfs et de muscles
toutes les piles de tous les ponts du mot sont sapés pour que filent en silence des idées flottées
On pourrait s'imaginer la langue, lumineuse et ailée, triomphante des vents malgré un équilibre précaire
pensée aérienne, mais qui se répandrait en vain, si délestée de la pierre de ses lettres et du bois de ses sons
Il faut qu'une aïeule lègue sa maison riche de mémoire à la langue, que cette grammaire permette la génération
assure la lignée, la succession des œuvres des hommes, les magistrales comme les intimes, et accouche une culture
Couvre le souvenir de ton visage avec le masque de celle que tu seras et effraie l'enfant que tu as été.
Alejandra PIZARNIK, Œuvre poétique, Actes Sud, trad. Claude Couffon, 2005
accent
grave
du poète
à retourner
aiguiser
débarber
expliquer avec des mots de ce monde
qu'un bâteau est parti de moi en m'emportant
Alejandra PIZARNIK, Œuvre poétique, Actes Sud, trad. Claude Couffon, 2005
...
entre le temps de tes tempes et l'espace de ton esprit
entre la fronde de ton front et les pierres de tes paupières
entre le bas de tes bras et le haut de tes os
entre le do de ton dos et le la de ta langue
entre les raies de ta rétine et le riz de ton iris
entre le thé de ta tête et les verres de tes vertèbres
entre le vent de ton ventre et les nuages de ton nu
entre le nu de ta nuque et la vue de ta vulve
entre la scie de tes cils et le bois de tes doigts
...
Gherasim LUCA, Héros-limite, Le soleil noir, 1953