Mimétique
Personne ne s'en rendait compte, et tu t'en allais.
Tu t'es incarné dans le départ
autre, entraînant,
de l'été.
Tu faisais comme faisait le temps :
rapetissant comme rapetisse le jour,
te décolorant comme les arbres
se décolorent. Tu suivais,
sans être vue, des caravanes de paysages,
qui lentement roulaient vers une autre face.
Et nous disions elle s'en va la belle saison.
...
Kiki DIMOULA, Le peu du monde, 1971,
Poésie-Gallimard, 2010, Trad. Michel Volkovitch.
Sur du vent - Page 223
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Kiki DIMOULA : ELLE S'EN VA la BELLE SAISON
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Une IDÉE de TOMATE
Un rouge plus simple que d'un coquelicot
sans la voile fragile d'une jonque
a franchi les parallèles
Appétit du midi
cherché trop loin de sa porte
trop avant l'envol des ombres
On chevauche obsédé le rêve d'un soleil
D'un couteau
grossièrement caressé
on n'en tire que de l'eau
Tomates vues d'en-haut, mais récoltées en août très loin des Pays-Bas. -
Laurent ALBARRACIN et les GRENOUILLES
Les grenouilles qui coassent
sont les cœurs éphémères de l'eau
elles appellent comme une pompe
amorçant sa disparition
un soufflet attisant son envolée
La bulle est aussi une fleur
en ses pétales nuls
Laurent ALBARRACIN, Le secret secret, Flammarion 2012.
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Kiki DIMOULA : la MÉMOIRE qui TRICHE
Autoconservation
Ce devait être le printemps
car le souvenir qui arrive
saute par-dessus des coquelicots.
Sauf si la nostalgie
dans sa hâte,
a mal vu le souvenu.
Tout se ressemble tant
au moment de la perte.
Mais la mémoire est peut-être exacte
et ce fond étranger,
et les coquelicots issus
d'une autre histoire,
mienne ou étrangère.
La mémoire fait des coups pareils.
Par amour du beau ou par vanité.
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Kiki DIMOULA, Le peu du monde, 1971,
Poésie-Gallimard, 2010, Trad. Michel Volkovitch. -
SUMMER of LOVE 2013
Pour le pouvoir des fleurs on pressait les guitares
en échange d'un plat de pâtes
on peignait sur les murs
Aux amis de passage
toujours un lit pour la nuit
ou pour un été
d'amour
de toute une année sans rature
Jusqu'aux rides d'une vie
abattues comme foudre aux racines des dents
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Les BONS COMPTES FONT les BONS CHIENS
Si Don Pedro Alfaroubeira avait quatre dromadaires, mes nouveaux voisins se contentent de leurs trois chiens. C'est plus sage, en vue du partage de leurs quinze peluches, une fois sèches.
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Georges GUILLAIN sur la PIERRE
puis assis sur la pierre elle
est chaude polie pourtant par l'eau
glacée - dedans la pointe d'un bâton de marche
qui bouillonne - juste le temps de reprendre souffle
avant de s'éloigner et d'emprunter peut-être une autre force
à l'usure immobile des choses - leur ombre qui grandit quand
on tourne le dos
Georges GUILLAIN, Avec la terre, au bout, Atelier La Feugraie, 2011
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La NUIT des ÉTOILES avec Lorine NIEDECKER
Matthieu DORVAL, Land's end, exposition au Port-Musée de Douarnenez en 2011.
Nuit illustrée constellations
d'horloge
et son retentissant
tic-tac stellaire
Je me lève bientôt
pour donner à l'univers
mes pichenettes
Lorine NIEDECKER, Clavecin et poisson salé
in Louange du lieu et autres poèmes, Corti
(trad. Abigail Lang, Maïtreyi et Nicolas Pesquès).