Cette manie de me savoir un ange,
sans âge,
sans mort où me vivre,
sans piété pour mon nom
ni pour mes os qui pleurent à la dérive.
...
Alejandra PIZARNIK, Œuvre poétique, Actes Sud, trad. Silvia Baron Supervielle, 2005
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Cette manie de me savoir un ange,
sans âge,
sans mort où me vivre,
sans piété pour mon nom
ni pour mes os qui pleurent à la dérive.
...
Alejandra PIZARNIK, Œuvre poétique, Actes Sud, trad. Silvia Baron Supervielle, 2005
Malgré les limites du cadre, un ange se tient dans toute la distance de sa verticalité transparente
son sourire invisible et silencieux, mais s'ouvre un dialogue voué à l'infini, des souvenirs comme des horizons
les voix sont égales de grâce et l'ange, sans plus de soupçon de vanité, se hisse à hauteur d'homme
et pour cela renonce à ses ailes qui vicieraient la réalité du monde, fausseraient la distance entre les âmes
Un effleurement perpétuel serait la douleur de l'ange, comme une voix étrangère qui parlerait par sa voix
en délivrant du haut vers le bas un message définitif sans les irisations incertaines du dialogue
Quelques mots de l'ange, glissés sur son regard d'azur et d'un geste économe, voilà sa distance
voilà la justesse de cordes et de vents qui semblent demander grâce et dont il est le gardien
quand, bien que toute de pétales, son empreinte demeure, et que personne ne songe à dire un ange passe
puisque toute gêne est à distance, le dialogue est d'or, et Dieu lui-même acquiesce à cette paix
Puis bientôt comme par vengeance, attribut éternel du fils d'Adam, le fardeau de la douleur s'abat sur l'ange
et l'on parle de chute, évoquant à la fois le fleuve qui se rompt et la fin ironique d'une histoire
prisonnier
des messages
à délivrer
pour d'autres
le sort de l'ange
4, marbre
Nulle hallucination et nul acousmate à mes parages réfractaires à l'échauffement où ces machineries comme détraquées me restent transparentes. Rien à attendre de lèvres sculptées pour l'éternité ni d'ailes pesant leur marbre, rien de ces illusoires étoffes, résidus végétaux prisonniers de la toile, poussière magnifiée par le hasard des lueurs d'une aube.
3, nouvelle
Du côté jardin, un rameau l'atteste et parfois une colombe, sur plusieurs colonnes l'ange se profile pour la nouvelle, devant un visage plus vierge que ces pages où la scène semble déjà écrite, et sur cette perspective carrelée, diagonale, une paire d'ailes diaphanes n'a pour pendant qu'une alcôve ceinte de voiles où toute idée de sexe restera mise en échec.
2, messages
Apparition flûtée, chuchotée, la musique étrange des sphères se faufile à travers anches, voie tracée à travers branches, messages ventés en vols de mésanges, dangers signifiés de nuées sombres à l'oreille, mais par qui ? Qui à l'autre bout de ces orgues souffle sa prophétie, inspire ses lumières de derrière le vitrail, qui pour gardien du troupeau des rêves ?
1, nuages
Sans sexe pour tout dire - le prix pour mieux dire ? -, les anges les fesses dans les nuages, cumulus joufflus, prêtes à frémir aux zéphyrs les plus subtils, puis nubiles à leur façon oblique, équivoque, mi-valet de tarot et mi-sirène de nocturnes, instillent leur voix, annoncent la couleur du temps qui vient, soufflent le coup qu'il faut jouer.
Le corps
Elle allait
à sa droite un ange gardien
à sa gauche un garde du corps
Prenez l'âme
dit l'ange à l'homme
moi cette nuit
je garde le corps
André SCHMITZ, in Ici on parle flamand et français, Le castor astral, 2005.