Le poète (est un moraliste qui) dissocie les qualités de l'objet puis les recompose, comme le peintre dissocie les couleurs, la lumière et les recompose dans sa toile.
Francis PONGE, La rage de l'expression, Mermod, 1952
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Le poète (est un moraliste qui) dissocie les qualités de l'objet puis les recompose, comme le peintre dissocie les couleurs, la lumière et les recompose dans sa toile.
Francis PONGE, La rage de l'expression, Mermod, 1952
Princesse déniée
lapidée sur la neige
la trace
de nos idées noires
Sandra MOUSSEMPÈS, Sauvons l'ennemie, Flammarion, 2025
Le corps que j'habite comme une hutte et à forfait déteste l'âme que j'avais et qui surnage au loin. C'est l'heure d'en finir avec cette fameuse dualité qu'on m'a tant reprochée. Fini le temps où des yeux sans lumière et sans bagues puisaient le trouble dans les mares de la couleur. Il n'y a plus ni rouge ni bleu. Le rouge-bleu unanime s'efface à son tour comme un rouge-gorge dans les haies de l'inattention.
André BRETON, Clair de terre, Gallimard, 1966
J'ai donc dormi j'ai donc passé les gants de mousse
Dans l'angle je commence à voir briller la mauvaise commode qui s'appelle hier
Il y a de ces meubles embarrassants dont le véritable office est de cacher des issues
André BRETON, Signe ascendant, Gallimard, 1949
Quand les fenêtres comme l'œil du chacal et le désir percent l'aurore, des treuils de soie me hissent sur les passerelles de la banlieue.
André BRETON, Clair de terre, Gallimard, 1966
Il suffit qu'une chose naisse
pour que son corps
la sépare à jamais.
Il suffit qu'une chose naisse
pour qu'en elle
elle ne puisse plus se rejoindre.
Il suffit qu'une chose naisse
pour qu'elle ne sache plus être présente
à elle-même.
Jean-Louis GIOVANNONI, Choix de poèmes, Unes, 2024
Je vous aime bien m'écrit un poète de vingt ans.
Charpentier débutant des mots.
Sa lettre sent la sciure de bois.
Sa muse dort encore dans le bois de rose.
Dans la scierie littéraire retentit un bruit ambitieux.
Les apprentis recouvrent de placage la langue crédule.
Ils taillent de timides contre-plaqués de phrases.
Sculptées par le rabot du haïku.
Les problèmes commencent
avec l'écharde enfoncée dans la mémoire.
Difficile de l'extraire
encore plus difficile de la décrire.
Des copeaux volent. Trognons d'anges.
De la poussière jusqu'au ciel.
Ewa LIPSKA, Moi Ailleurs l'écharde, traduit du polonais, Grèges, 2008
Tu ne sais pas la grande injure que tu fais à la candeur bleue du ciel
que tu fais à l'offrande d'un parterre de tulipes
à l'austérité d'un village de montagne qui lisse la peine des hommes
que tu fais à une passante plus lente que les autres dont la demande est peut-être l'épouse de ta demande
et dont la lenteur n'est peut-être qu'imploration
Guy LÉVIS MANO, Loger la source, Folle avoine, 2007